Vendredi lecture | Bullshit Jobs

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Vendredi lecture | Bullshit Jobs

4 mars 2022

Le livre est dédié « À tous ceux qui préféreraient être utiles à quelque chose" , cette entrée en matière plante le décor. Aujourd’hui, l’Observatoire OCM vous recommande la lecture du bestseller de l’anthropologue américain, aujourd'hui disparu, David Graeber : BULLSHIT JOBS publié aux éditions Les Liens qui Libèrent en septembre 2018.

Nous ne nous attarderons pas sur la dimension politique de l’ouvrage ainsi que sur les convictions de son auteur que nous ne souhaitons pas commenter. Nous souhaitons en revanche nous arrêter sur l’essence même du livre : le phénomène des « Jobs à la con » défini par son auteur comme « une forme d’emploi rémunéré qui est si totalement inutile superflue ou néfaste que même le salarié ne parvient pas à justifier son existence bien qu’il se sente obligé, pour honorer les termes de son contrat, de faire croire qu’il n’en est rien », et selon l’auteur, ces bullshit jobs sont légion et auraient des conséquences sociétales et individuelles dramatiques : perte de sens, anxiété, dépression ..

À l’origine de ce livre, un article intitulé « le phénomène des jobs à la con » rédigé par David Graeber en 2013 pour le magazine radical « Strike ». À la suite du succès inattendu de cette publication, des travailleurs du monde entier lui ont témoigné par e-mail leur expérience en tant détenteur d’un bullshit jobs. David Graeber a alors mené une enquête poussée sur le sujet, élaborant une typologie des différents jobs à la con, grâce aux témoignages d’inconnus du monde entier avec une dénomination drôle et cinglante qui lui est propre : 1. Les larbins – 2. Les portes-flingues – 3. Les rafistoleurs – 4. Les cocheurs de cases – 5. Les petits-chefs.

Que l’on adhère ou non aux idées politiques de son auteur, nous souhaitons saluer la liberté absolue de ton de « Bullshit Jobs ». Son style est vif, virulent et sans concession. À la lecture des témoignages, le lecteur oscille entre fou rire et consternation tant les situations sont absurdes et vides de sens.

Florilège :

Témoignage de Kurt :

« L’armée allemande a un sous-traitant chargé de son service informatique. La société informatique a un sous-traitant qui s’occupe de sa logistique. L’entreprise de logistique a un sous-traitant auquel elle délègue sa gestion du personnel, et moi, je bosse pour cette boite-là. Imaginons que le soldat A ait besoin de déménager dans un bureau deux portes plus loin, au bout du couloir. Au lieu d’y aller directement avec son ordinateur sous le bras, il doit remplir un formulaire ».

Kurt nous enseigne le « process » du traitement du formulaire par le sous-traitant informatique puis par la société de logistique en charge d’approuver le déplacement et réclamer ensuite du personnel auprès de la boite de Kurt afin de réaliser l’opération de déménagement … au bout du couloir. « C’est là que j’entre en scène. Je reçois un email qui me dit : va à la caserne B pour telle heure. En général, ces casernes sont éloignées de chez moi entre -100 et 500km- donc je dois louer une voiture ». Une fois sur place, Kurt remplit lui aussi un formulaire, déconnecte l’ordinateur, l’emballe dans un carton et « demande à un gars de la logistique de l’emporter dans le bureau d’à côté. Là je déballe le carton, je remplis un autre formulaire, je reconnecte l’ordinateur ».

Le ton est donné. Bonne lecture à vous.