Licence libre : Pas si libre que ça …

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Licence libre : Pas si libre que ça …

6 avril 2022

Le droit d’auteur confère à chaque créateur d’une œuvre de l’esprit (image, dessin, texte, musique, logiciel, etc.) le droit de réguler l’exploitation de son œuvre.

Par principe[1], à défaut d’autorisation préalable de l’auteur (par le biais d’une cession ou d’une licence), l’exploitation d’une œuvre est interdite. Il est donc impératif pour toute personne physique ou morale souhaitant exploiter une œuvre de l’esprit d’obtenir cette autorisation, ce qui peut s’avérer compliqué et onéreux, puisqu’il faut négocier les modalités d’exploitation, la durée et le territoire, et que les autorisations sont rarement concédées à titre gratuit.

Pour éviter ces formalités, d’aucun pourrait être tenté d’exploiter une œuvre sous « licence libre ». L’expression « licence libre » laisse en effet penser que l’exploitation de l’œuvre est d’une part, gratuite et d’autre part, dépourvue de toute limitation. La réalité est toute autre…

Une licence libre, c'est quoi ?

Une licence libre est une autorisation donnée par l’auteur, à tous et par avance, d’exploiter son œuvre dans des conditions déterminées.

Contrairement aux idées reçues, l’exploitation de l’œuvre n’est pas libre, elle est encadrée par les termes de la licence choisie par l‘auteur. Traditionnellement, les licences libres encadrent 4 types de droits qui peuvent être combinés de différentes manières :

  • Le droit d'utilisation de l’œuvre à des fins privées ;
  • Le droit de modification de l’œuvre ;
  • Le droit de redistribuer l’œuvre à des tiers à des fins commerciales ou non ;
  • Le droit de publier l’œuvre modifiée auprès des tiers à des fins commerciales ou non.

En exploitant une œuvre sous licence libre, on fait l’économie de la demande d’autorisation à l’auteur (et parfois du paiement de royalties, de nombreuses licences libres étant en effet gratuites) mais, comme pour tout accord en matière de droit d’auteur, l’exploitant est tenu de respecter les obligations mises à sa charge par la licence. Le non-respect de ces obligations constitue un acte de contrefaçon.

La diversité des licences libres

Les licences libres étant une combinaison des droits précités et d’autres obligations définies librement par les auteurs, elles sont aussi diverses que variées. Il convient donc de bien en lire les termes si l’on veut éviter toute exploitation contrefaisante de l’œuvre.

Afin de faciliter la tâche des auteurs et des preneurs de licence, certaines sociétés ou associations ont créé des licences libres « standards » qui sont aujourd’hui largement utilisées. C’est le cas notamment des licences dites « Creative Commons » (CC) qui permettent grâce à des pictogrammes et/ou des sigles d’indiquer à tous, de manière simple, les autorisations d’exploitation concédées par l’auteur.

Quatre conditions d’utilisation des œuvres composent ainsi les licences CC :

  • « BY » ou « Attribution » : L’auteur oblige les utilisateurs à le créditer de la manière dont il le demande ;
  • « NC » ou « Non Commercial » : L'auteur autorise la reproduction, la diffusion et la modification de son œuvre, pour toute utilisation autre que commerciale ;
  • « SA » ou « Share alike » : L'auteur autorise la reproduction, la diffusion et la modification de son œuvre, à condition que les utilisateurs publient toute adaptation dans les même conditions (sous la même licence) ;
  • « ND » ou « Non derivative works » : L’auteur interdit toute modification de son œuvre.

A partir de la combinaison d’une ou plusieurs de ces conditions, 6 licences CC ont été créées : BY ; BY-SA ; BY-NC ; BY-ND ; BY-NC-ND ; BY-NC-SA.

Les CC sont aujourd’hui largement utilisées pour la musique et les logiciels. Il existe bien évidemment de nombreuses autres licences libres plus ou moins standardisées dont les conditions sont aisément accessibles sur internet.

Attention au copyleft

Jeu de mot découlant du terme anglais « copyright » (parfois traduit en français par « gauche d’auteur »), le copyleft est l'autorisation donnée par l'auteur d'utiliser, d'étudier, de modifier et de diffuser son œuvre, à la condition que la modification apportée (correction, ajout, réutilisation, etc.) soit diffusée dans les mêmes conditions que l’œuvre originale[2].

Ainsi, les licences copyleft provoquent un effet domino et rendent les œuvres nouvelles, basées sur une œuvre originale « copyleftée », incapable d’appropriation par le droit d’auteur. On parle fréquemment de licence contaminante.

Par conséquent, si vous avez pour projet de créer et exploiter une œuvre à titre commercial, il convient de faire très attention à ne pas utiliser d’œuvre copyleft comme base de votre création. A défaut, l’œuvre créée sera contaminée. Vous ne pourrez revendiquer aucun droit sur cette dernière et serez contraint de le diffuser gratuitement sans aucun contrôle.


[1] à l’exception des cas prévus à l’article L.122-5 du CPI

[2] Cela correspond au SA dans les licences CC vues ci-dessus.