Les Scop : sociétés coopératives et participatives

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Les Scop : sociétés coopératives et participatives

23 mai 2022

Couramment appelés Scop, les sociétés coopératives et participatives sont créées par la loi du 19 juillet 1978, elles désignent les entreprises à statut Scop (Société coopérative de production) et à statut Scic (Société coopérative d’intérêt collectif). Tout en demeurant régies par le principe de profitabilité gouvernant toute entreprise, ces sociétés bénéficient d’une gouvernance démocratique et d’une répartition des résultats prioritairement affectée à la pérennité des emplois et du projet d’entreprise.

C’est donc dans son mode de fonctionnement et dans sa « philosophie » même que ce type d’entreprise se situe en marge des entreprises traditionnelles car d’un point de vue structurel, elles peuvent prendre la forme juridique de SARL, de SAS ou de SA.

Techniquement, une Scop…

Le principe fondamental qui gouverne le statut juridique des Scop réside dans la part majoritaire des associés salariés de l’entreprise. En effet, ceux-ci doivent détenir au moins 51 % du capital social et 65 % des droits de vote. Si tous les salariés ne sont pas associés, tous ont vocation à le devenir (ainsi se définit la Scop sur le site web du gouvernement). Le dirigeant est lui élu par les salariés associés sur le principe démocratique d’une personne/une voix.

Schématiquement, on pourrait dire que le principe de la démocratie gouverne le statut des Scop :

  1. Les grandes décisions sont prises par vote,
  2. Le dirigeant est élu,
  3. Les risques sont égalitairement partagés,
  4. Le partage du profit y est équitable :
    • Une part dite "travail" pour tous les salariés, sous forme de complément de salaire. Cette part représente minimum 25 % du profit.
    • Une part dite "capital" pour les salariés associés sous forme de dividendes. Cette part représente 33 % au maximum du profit.
    • Une part dite "entreprise" représentant minimum 16 % du profit pour les réserves de l’entreprise.

Dans une Scop, les réserves prennent une place prépondérante et contribuent au développement de l’entreprise et à la consolidation des fonds propres en assurant la pérennité de l’entreprise.

Quelques chiffres :

Les entreprises régies sous forme de Scop sont aujourd'hui très présentes en France et cela dans divers secteurs d'activités et des structures de petite et grande échelle, de la TPE à la grande entreprise de plusieurs centaines de salariés, à l'instar du Groupe UP (ex Chèque Déjeuner), ou d'Acome (plus de 1 200 salariés). Contrairement aux idées reçues, de nombreuses entreprises de grande renommée sont administrées sous forme de Scop : le journal Alternatives Économiques, la société de jouets Moulin Roty, le Théâtre du Soleil, Éthiquable (entreprise leader du commerce équitable), l'école de conduite ECF, de nombreuses antennes du Relais, des Biocoop...

Lire aussi : Notre série de portraits : Le nouveau visage des COOP

En 2021, selon les chiffres du site Les SCOP.coop, la France comptait 3 801 Scop employant 71 084 salariés (81 084 emplois en comptant les filiales en France et à l’étranger).

Cette vidéo explicative apportera à tous ceux désireux d’en savoir plus une vue d’ensemble des derniers chiffres.

Créer une Scop

L'obtention du statut est assujettie à une procédure stricte prenant le nom de demande de reconnaissance devant être adressée au Ministre chargé du travail, qui la transmet pour avis à la Confédération générale des sociétés coopératives ouvrières de production (CG Scop). Le ministre chargé du travail notifie ensuite sa décision à la société intéressée dans un délai de 2 mois à compter de la date de dépôt de la demande. 

Le contrôle de la société ainsi créée se poursuit ensuite dans le temps car, chaque année, dans les 6 mois suivant la clôture de son exercice social, celle-ci doit communiquer au ministre chargé du travail un certain nombre d'informations portant sur le suivi de son activité (pièces comptables, déclarations des opérations de mise en location-gérance ou d'apports en société ou de cessions d'actifs immobilisés, modifications apportées aux statuts ou à la composition des organes sociaux).

Par ailleurs, elle est dans l'obligation de transmettre tous les 5 ans un rapport critique et analytique de sa situation et de son fonctionnement.

À défaut d'avoir satisfait à ces obligations, la société pourra être radiée de la liste ministérielle des SCOP, et perdre ses différents bénéfices. Ces bénéfices résident en l’exonération de certains impôts dans des conditions particulières dont le propos ici n’est point de les exposer.

Alors, qu’en penser ?

En premier lieu, ce type d’administration de société possède une vertu essentielle :  rétablir un dialogue, une communication réelle et constructive entre les hommes et les femmes qui composent l’entreprise. En associant aux décisions stratégiques de l’entreprise, des compétences différentes et des savoir-faire internes, ces forces vives s’impliquent, se sentent investis dans leurs vies professionnelles et reconnues en tant qu’individu et expert. Associer ces personnes à l’administration de la société, c’est prévenir les conflits sociaux, éviter le décalage, réel ou ressenti, entre les équipes dirigeantes et le personnel.

Loin de dépeindre une vision angélique de ce type d’organisation, il est indéniable que ce dialogue retrouvé, s’il ne saurait résoudre toutes les difficultés de l’entreprise, génère une émulation constructive.

Ensuite, le législateur a su ancrer ce statut dans la réalité économique en permettant que les Scop intègrent et emploient des personnes n’ayant pas la qualité d’associé ou encore admettent en qualité d’associé des personnes physiques ou morales non-salariés de la société. Cette entorse au principe selon lequel une Scop suppose le cumul des qualités d'associé et de salarié est un atout extrêmement important. Ce réalisme économique permet ainsi à des compétences extérieures, qui n’existent pas nécessairement au sein même de l’entreprise, d’intégrer un projet pour le pérenniser. Cette union d’hommes et de femmes, réunis autour d’un projet commun et forts de leurs compétences réciproques est indéniablement une philosophie séduisante.

Mais les limites du système et l’inertie de certains acteurs préférant rester dans des schémas plus "traditionnels" est un véritable frein pour ces sociétés. Bien souvent, l’absence de conseil, notamment sur le plan économique ou en investissement condamne dans l’œuf des projets qui humainement pourraient être viables. Citons l’exemple de Muriel Pernin qui, en 2013, à Villeurbanne (Rhône), a ouvert Les Atelières, une coopérative regroupant des ouvrières licenciées de Lejaby. Son pari de relancer une unité de fabrication pour ne produire que de la lingerie haut de gamme n’aura malheureusement duré que deux ans. « Notre capital de départ (environ 300 000 euros) n’était pas suffisant, nous avions besoin du double pour travailler sur de petites séries de très haut de gamme. J’aurais dû me faire épauler », analyse Mme Pernin avec le recul.

Trop souvent, lorsque le choix de la Scop naît de la situation d’échec d’une entreprise existante, les salariés se lancent dans le projet avec malheureusement des délais extrêmement courts pour que le dossier soit accepté par la Confédération régionale des SCOP, le Tribunal de Commerce et d’autres organismes essentiels comme les établissements bancaires.

Ces banques sont-elles mêmes encore assez rarement enclines à financer ce type de structure, leurs propres mécanismes internes de décision souffrant eux aussi d’une inertie décisionnelle et de « process » complexes.

D’un point de vue humain enfin, les efforts que doivent fournir les acteurs du projet sont aussi considérables. La restructuration imposée par ce type de forme juridique impose souvent une baisse de salaire drastique ainsi qu’une réorganisation totale des rapports et de la hiérarchie internes.

Le succès croissant de cette forme d’entreprise illustre le besoin que ressent une partie des entrepreneurs et des professionnels à vouloir s’impliquer dans une forme alternative de gestion de structure. Rapprocher les hommes et les femmes de leur outil de travail en les impliquant, en prenant en compte leur avis, leurs idées, dans une synergie où une forme d’égalité est respectée, telle est sans doute une des raisons de ce succès. Mais plus encore, il semble que l’absence de vision décalée des acteurs de l’entreprise elle-même soit un facteur de réussite : ici, dirigeants, employés et actionnaires travaillent de concert, tendent vers un même but et nourrissent les mêmes ambitions. Gageons que cette philosophie puisse être appliquée en d’autres structures…

Vous trouverez ci-joint la liste de toutes les Scop de France et leurs adresses :


Un peu d’Histoire

Historiquement, les premières "associations ouvrières" sont nées dans la clandestinité au début du XIXème siècle, l'associationnisme ouvrier se construisant sur le refus de la subordination économique ou salariale.

En effet, depuis la révolution, la Loi Le Chapelier de 1791 interdisait toute "coalition" incluant les associations et autres organisations de personnes (il ne devait y avoir aucun intermédiaire entre l'État et le Citoyen).

Lire notre article sur l’histoire de l’apprentissage en France expliquant toute l’importance de la Loi Le Chapelier sur les institutions françaises.

  • En 1871, durant la Commune de Paris, les ateliers abandonnés par les chefs d'entreprises sont massivement repris par leurs ouvriers (reprise qui ne durera que le temps de la Commune).
  • En 1884 naît l'ancêtre de la CG Scop, la Chambre consultative des associations ouvrières de production.
  • En 1900, le pays compte près de 250 coopératives de production. En 1910, elles seront 500, représentant 20 000 sociétaires.
  • Le Mouvement connaîtra des évolutions erratiques durant tout le siècle, ses phases de fort développement se situant essentiellement en 1936, durant l'après-guerre, entre 1978 et 1982 et depuis 1995.
  • En 1979, la France comptait environ 650 Scop ; en 1985, le chiffre atteignait 1 300 Scop employant 40 000 personnes.
  • Les Scop ont permis d'inventer de nouveaux types d'entreprises, comme les coopératives d'activités (CAE - 1995) ou les sociétés coopératives d'intérêt collectif (SCIC - loi 2001).
  • En 2003, l'Union européenne adopte une Directive à appliquer avant 2007 dans les États membres sur le statut de Société coopérative européenne.
  • En 2010, pour mieux refléter la diversité des Scop, présentes dans tous les secteurs d'activité, et pour ne pas faire référence à la lutte des classes, le mouvement adopte l'appellation « Société coopérative et participative » (anciennement Coopérative Ouvrière de Production) et lance sa première campagne nationale de communication.
  • En 2014, la loi ESS instaure plusieurs dispositions spécifiques aux Scop.