Histoire du Bitcoin

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Histoire du Bitcoin

25 septembre 2018

Le bitcoin, un nom que tout le monde connait mais dont la réalité échappe à la plupart d’entre nous. L’étudier nous fait nous rendre compte que son histoire est le miroir de la nôtre, le reflet de notre société, de ses réussites phénoménales et de ses contradictions permanentes : voyage au pays d’une utopie qui a réussi…

Le Bitcoin nait en 2009, juste après le déclenchement de la crise financière de 2008 dont il est une réaction contestataire. En effet, le bitcoin est avant tout le fruit d’un mouvement libertarien (mouvement de pensée libéral extrême, anti keynésien, prônant la liberté individuelle comme dogme suprême) et n’est mu, au départ, que par une idée : créer une monnaie qui échapperait aux États et aux banques. Sa création est porteuse de valeurs contestataires et d’une idéologie : une devise apatride évoluant dans un marché totalement libre et ouvert.

Satoshi Nakamoto (pseudonyme énigmatique sur lequel légendes urbaines et suppositions multiples d’identité réelle existent) fonde le bitcoin dans un contexte socio-économique particulier : le scandale des subprimes est à son paroxysme, un mouvement mondial d’indignation et de condamnation du système bancaire est généré par la faillite de Lehman Brothers et surtout, les banques centrales pallient à cette situation en injectant dans les économies des milliards de dollars en faisant fonctionner à plein les planches à billets, générant des dettes colossales.

Le bitcoin fleurit sur ce terreau, la volonté première de ses créateurs est une critique d’un système politique et financier incapable de réguler et d’offrir une stabilité pour les épargnants. Nakamoto semble s’inspirer (sans jamais y faire la moindre allusion officielle) des préceptes d’un des maîtres à penser libertarien, Friedrich Hayek qui proposait, dés 1976, un modèle de free banking fondé sur la concurrence de monnaies privées libérées de tout arbitrage étatique ou bancaire et dont l’autorégulation serait engendrée par les mécanismes vertueux de la concurrence et du marché.

Cette "monnaie", car il faut bien ainsi la qualifier, ne dépend d’aucun État, d’aucune banque, sa valeur ne peut être modifiée par ses créateurs pour une raison simple et « brillante » : son émission est gérée de façon décroissante dans le temps par un algorithme mathématique non modifiable et surtout, il est prévu au départ qu’il n’y aura jamais plus de 21 millions de bitcoins en circulation. Sa rareté est donc l’unique moteur de sa valeur faciale, elle s’échange partout dans le monde sans aucune frontière et n’est surtout soumise à aucuns frais bancaires de quelque nature.

Une fois sa genèse expliquée, il faut s’interroger sur la réussite de ce bitcoin.

Au départ, il n’est qu’une curiosité libertarienne, qui ne fédère que des geeks qui y voient un symbole de lutte contre le système bancaire et monétaire, sûrement sans en anticiper le succès futur. Mais le mouvement va prendre de l’ampleur, notamment par la sophistication structurelle du système imaginé dès le départ par son créateur.

Expliquer le système bitcoin est une entreprise extrêmement ardue. Nous tenterons ici de vous présenter les principes de fonctionnement.

Imaginons que vous désiriez acquérir un bitcoin, deux solutions s’offrent à vous :

  • En recevoir de la part d’une personne en possédant ; ou
  • En acheter via une plateforme d’achat contre une somme en devise "traditionnelle".

Mais, parce qu’il y a un mais, il vous faudra préalablement vous créer un porte-monnaie, appelé "wallet" pour accueillir ce bitcoin. Pour cela, là encore deux solutions :

  • Le créer sur votre propre ordinateur sous forme d’un logiciel natif que vous devrez très méticuleusement protéger contre toute attaque externe ; ou
  • Faire appel à un wallet externe via un prestataire qui sécurisera votre monnaie.

Dans les deux cas, vous sera attribué une clé alphanumérique publique anonyme et cryptographiée et une clé alphanumérique privée dénuée de toute référence à votre identité.

Pour effectuer votre transaction, un fichier (appelé blockchain) va être généré sur le réseau web contenant :

  • La clé alphanumérique de l’émetteur du bitcoin ;
  • La clé alphanumérique du récepteur du bitcoin ;
  • Le montant de la transaction ;
  • Les références de la chaine de transaction à l’origine du bitcoin objet de la présente transaction.

Grace à ce système de cryptographie à clé publique et privée (nommée PKI), émetteur, récepteur et historique du bitcoin au sein d’une chaine sont facilement identifiables par toutes les machines utilisant le système bitcoin.

Cette complexité est nécessitée par le système lui-même, en effet, votre identité réelle et celle de l’émetteur ne sont pas connues par l’informatique, de même, votre solde bitcoin pas plus que le solde bitcoin de l’émetteur n’est pas non plus connu de l’informatique : la possession des bitcoins n’est que le fruit des déductions faites à partir des différentes chaines de transactions régulièrement mises à jour sur toutes les machines et qu’un certain nombre d’entre elles va devoir authentifier pour valider la transaction par un calcul mathématique complexe. Ces vérificateurs sont appelés "miners" et bitcoin fait en sorte (par un système d’intéressement en bitcoin) de multiplier leur mise en place sur les ordinateurs de tous les utilisateurs.

Cette infographie permet de mieux appréhender le principe de la blockchain.

La complexité de l’algorithme de calcul, de la vérification de la chaine historique de transaction et du nombre de validation par des miners aléatoires rend la fraude virtuellement impossible. On estime qu’il faudrait à un fraudeur une puissance de calcul correspondant à 10 % du volume global des ordinateurs des miners pour générer une opération frauduleuse.

Pour ceux d’entre vous qui souhaiteraient en apprendre davantage, vous trouverez sur ce lien l’explication de l’algorithme par son créateur : https://bitcoin.fr/Bitcoin-explique-par-son-inventeur/

Le bitcoin peut se capitaliser à la somme de 130 milliards de dollars à ce jour.

Mais, en réalité que signifie ce chiffre ? Il faut bien évidemment se placer dans une lecture globale pour pouvoir le comparer, et se rendre compte par exemple que les liquidités en circulation dans le monde sont estimées à 80 000 milliards de dollars… ce qui représente pour le bitcoin, 0.0016 % des liquidités circulantes, une goutte d’eau !

Ce chiffre explique sans doute le « mépris » des institutions financières vis à vis de cette monnaie.

Depuis son apparition, le système est critiqué de toutes parts. Pléthore d’économistes ont écrit sur le sujet, certains louant ces vertus, d’autres (plus nombreux) spéculant sur son éclatement programmé.

Il en ressort un certain nombre de faits et de questionnements que nous souhaitons aborder.

En premier lieu, le bitcoin se définit comme pur en raison de sa réalité numérique et non physique, cette matérialisation étant, pour les défenseurs du bitcoin, une des origines de la perversion de la monnaie. Mais cet argument n’est pas probant à l’analyse, en effet, les monnaies « traditionnelles » actuelles sont-elles même de plus en plus digitalisées, les échanges via le réseau sont légions et désormais totalement entrés dans les mœurs (protocole SSL, plateformes boursière web etc…). La « pureté » générée par cette digitalisation n’est donc pas un argument que peuvent légitimement opposer au système bancaire les créateurs du bitcoin.

Ensuite, le caractère virtuel de cette monnaie devient lui aussi discutable en raison de son évolution. En effet, le matériel informatique nécessaire aux calculs toujours plus complexes des machines des miners devient une fuite en avant technologique dont les besoins en électricité et en matériel font du bitcoin une monnaie dont la virtualité totale devient toute relative. En réponse à cette complexité matérielle, les miners se regroupent de plus en plus pour créer des pools plus importants et mutualiser le matériel toujours plus puissant nécessaire aux calculs mathématiques d’entérinement des transactions. Ce faisant, des situations dangereuses voient le jour : on peut imaginer qu’un regroupement trop important de ces miners devienne un danger pour le système tout entier. En effet, le chiffre « fatidique » des 51% hante les sites web spécialisés sur le sujet. Ce pourcentage théorique est relatif à la cote part de puissance de calcul dont un « pool » de miners aurait besoin pour biaiser le système tout entier et créer une chaine de bloc nouvelle brisant l’antériorité des transactions bitcoin. Mais tous les spécialistes du sujet se veulent rassurants : le succès croissant du bitcoin augmente naturellement et exponentiellement le coût logistique d’une telle entreprise d’une part, et des palliatifs mathématiques sont désormais prévus en théorie pour empêcher une telle situation. De surcroit, on imagine assez mal des miners qui génèrent leurs profits d’un produit, œuvrer pour le détruire…

Enfin et surtout, du point de vue de l’Observatoire OCM, observer ce produit et son évolution est avant tout constater une dérive qui devrait questionner notre société. D’une idée folle et libertaire, révolutionnaire et contestataire, utopique et pourtant incroyablement minutieuse et précise dans sa conception, il nous apparait que tout ce que l’idée originelle a combattue est devenue tout ce qui la qualifie désormais… Ne nous méprenons pas, cette critique ne s’adresse pas aux utilisateurs militants ni même aux concepteurs mais à toutes celles et ceux qui dénaturent l’idée première et tous ceux qui s’en réjouissent.

Car le bitcoin est le miroir d’un paradoxe de notre société : le succès engendre souvent la perversion d’une idée ou d’un produit. Sa réussite attire la convoitise des puissants et en éteint sa vraie valeur : la pureté.

Force est de constater que si le principe d’achat de produit par l’utilisation du bitcoin était l’idée fondatrice, le caractère spéculatif qu’a enfanté son succès a depuis longtemps pris le pas sur sa raison d’être première.

S’il est possible d’utiliser les bitcoins pour vendre ou acheter biens ou services au sein d’un réseau de marchands qui les accepte, cette pratique est, en revanche, encore extrêmement limitée en pratique. Dans les faits, les bitcoins sont achetés avec des devises officielles sur des plateformes spécialisées, à un cours de marché qui fluctue en fonction de l’offre et de la demande. Aussi, il devient de fait une devise parmi les autres et se transforme en un actif de spéculation pour nombre d’investisseurs avides de profits et dont la motivation est loin d’être la lutte contre un système ou la défense d’une idée alternative d’économie détachée de la mainmise des États et des banques.

C’est sa valorisation toujours plus importante qui corrompt l’idée première et attire, au-delà des spéculateurs, toute une économie parallèle qui y voit une aubaine pour le blanchiment de leurs devises illégalement perçues.

Aussi nous pouvons nous interroger sur l’inéluctabilité de la perversion des idées alternatives par une partie de leurs utilisateurs. Combien de temps encore les créateurs et les utilisateurs « honnêtes » de cette monnaie pourront ils fermer les yeux sur cette pratique ? Combien de temps encore les États feront-ils de même ? Et, en poussant plus loin le raisonnement, l’intervention des institutions que le fondement même du bitcoin est de combattre, ne deviendra-t-elle pas le seul bouclier à sa dénaturation complète et donc à sa survie ?

Quoi qu’il en soit, les petits épargnants n’auront pas accès à ce marché… pour le moment…

Nul doute que nous reparlerons rapidement de ce sujet.

Enfin, vous trouverez ci-après une timeline OCM des évènements marquants de l’histoire du Bitcoin.