Le féminisme a-t-il sa place en entreprise ?

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Le féminisme a-t-il sa place en entreprise ?

29 juillet 2021

"Demain, l’entreprise féministe?", tel était le titre d’un atelier organisé en mars par le collectif les Ateliers Durables. L’occasion de s’interroger sur la place des femmes en entreprise et sur la vocation même de l’entreprise.

Le concept d’entreprise féministe a t’il un sens? Oui répond sans hésiter Vinciane Mouronvalle Chareille, fondatrice de l’agence de communication uniQ en son genre. Non seulement il a un sens mais il a un sens dès aujourd’hui insiste la communicante. « Pourquoi ne pas utiliser le terme humaniste ou égalitariste? Car cela va de pair avec un constat: les inégalités se produisent en défaveur des femmes ». Les chiffre en la matière sont d’ailleurs édifiants: 56% des femmes déclarent qu’avoir un enfant a un impact sur leur carrière; les mères gagnent 11 % de moins que les pères à 25 ans et 25 % de moins à 45 ans.

Trop souvent caricaturé et assimilé à un mouvement de haine de l’autre, la définition du féminisme que nous retenons dans cet article c’est la volonté d’égalité pour tous.

La deuxième question que l’on peut se poser face à cet intitulé de table-ronde, c’est le rôle que doit avoir l’entreprise dans le changement sociétal.  "L’entreprise n’est pas un espace hors sol, c’est un espace social comme les autres. Si sa volonté est de travailler sur les questions de bien-être au travail, de RSE, alors elle se doit d’adopter une posture féministe, d’aller en faveur des droits des personnes, de la sécurité des femmes, lutter contre le harcèlement, les discriminations indirectes voir inconscientes" affirme Vinciane Mouronvalle Chareille. D’ailleurs la RSE, la QVT et l’écologie sont des thèmes dont personne ne remet plus en cause la pertinence au sein des organisations.

Le confinement n’aura pas l’effet escompté

Si depuis les années soixante-dix les femmes travaillent en grande majorité, le temps qu’elles consacrent aux tâches domestiques et familiales n’a pas pour autant baissé. Le confinement et son corollaire, le télétravail, auraient pu inverser la tendance permettant de redistribuer les rôles au sein du foyer. En réalité dans 70% des familles, c’est la mère qui se serait chargée de l’ensemble des tâches familiales et cela même lorsque les deux couples travaillaient (selon une étude réalisée par le site Smart sitting).

La crise sanitaire a pourtant mis en relief deux points essentiels : l’impact de la vie personnelle sur la vie professionnelle et la gestion différente de l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, selon le genre.

Désormais l’entreprise se doit de prendre en compte un facteur essentiel : la parentalité. D’ailleurs l’année 2020 aura vu naitre plusieurs initiatives intéressantes en la matière : Best workplaces to work for women ou le Parental Act lancé par Céline Lazorthes, Isabelle Rabier et Thibault Lantier, en faveur d’une rémunération à 100% du congé parental du deuxième parent, soutenu par 391 entreprises.

Vers l’égalité professionnelle

L’entreprise dispose d’un outil simple et accessible pour œuvrer en faveur de l’égalité : les mots.

Vinciane Mouronvalle Chareille forme des communicants et des personnes travaillant en entreprise et dans le secteur public au langage ouvert, qu’elle a créé en 2017. "Il s’agit d’utiliser autre chose que le masculin appris à l’école annoncé comme neutre. Des études psychosociales, sociologiques et en intelligence artificielle démontrent le contraire. Le langage est notre liant sociétal, c’est aussi un moyen de rendre une société plus égalitaire" explique-t-elle. Un exemple ? Au lieu d’utiliser "les salariés" que notre inconscient associe à des hommes on peut parler du "personnel". D’ailleurs les intitulés de fonction au sein des structures demeurent encore trop cloisonnés. A la différence du langage inclusif qui vise à ajouter des termes nouveaux à de l’existant, le langage ouvert, véhicule une vision du monde visant à rééquilibrer la présence du féminin et du masculin en y ajoutant des mots neutres, capables de parler au plus grand nombre. D’ailleurs uniQ en son genre travaille, au-delà des mots, sur le non-verbal et les représentations visuelles.

La formation des managers et le recrutement constituent deux autres leviers pour avancer vers d’avantage d’égalité professionnelle. Les RH peuvent proposer des formations, des parcours innovants, surmesure, sortant du cadre classique pour amener les équipes à penser différemment. Pour faire évoluer la culture d’entreprise et faire accepter le changement, il faut qu’il soit uniforme. Il s’agit alors de former les managers mais aussi et surtout de sensibiliser les dirigeants pour qu’ils deviennent acteurs du changement. Autre possible levier : l’index d’égalité professionnelle. "La communication est la grande oubliée de l’index d’égalité. Les RH peuvent faire évoluer le posture de l’entreprise, le marketing, la communication externe, institutionnelle avec un langage plus ouvert" conclut Vinciane Mouronvalle Chareille.