Le besoin de se raconter sur LinkedIn, un début de thérapie ?

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Le besoin de se raconter sur LinkedIn, un début de thérapie ?

30 septembre 2022

Il est assez fascinant de voir comment le réseau LinkedIn, initialement destiné à des échanges de sujets liés au monde professionnel, est devenu un amalgame de genres, entre dérives politiques et branding personnel, revendications ou militantisme en tout genre voire règlements de compte. Les émotions y prennent toute la place, au-delà des faits rapportés, des études sources partagées et des vérités propres à chacun(e).

Du militantisme aux blessures non pacifiées

Au-delà des publications d’entreprises et de porte-parole où l’égo se mélange parfois au propos, les sphères perso et pro, les sphères publiques, privées et politiques se côtoient. On y trouve à boire et à manger, miroir d’une société qui tend à croiser les visions et faire tomber les silos. Pourtant, les algorithmes nous enferment dans une autre forme de silo, celui de l’entre-soi, cultivant notre besoin de réassurance sur la base de la confiance accordée à nos semblables. On peut s’en agacer mais force est de constater que LinkedIn est un des pivots clés de la communication professionnelle, reflet de cette tendance sociétale en mutation dont il est difficile de se défaire à l’heure où la marque employeur et le marketing personnel deviennent des passages obligés de développement.

Au-delà de réflexions partagées et de sensibilisations à des degrés divers et variés, de flatteries douteuses ou discussions orageuses, on peut y percevoir une quantité de blessures non pacifiées. Il suffit d’observer les pseudo-débats, les joutes de posts qui ne laissent pas la place à la nuance comme une multitude de récits personnels. En effet, que laisse percevoir ce besoin irrépressible de témoigner d’un événement marquant de sa vie pour se sentir exister, un besoin irrépressible de faire-valoir, d’appartenance ou d’être aimé ? Derrière nos façons de dire, il y a toujours un enjeu personnel sous-jacent, rarement conscientisé. Écrire peut être un joli geste de thérapie, mais cela étant, suffit-il ?

“Puisque le monde n’a pas de sens, pourquoi ne pas s’en inventer un ?” nous dit Alice.

“Ceux qui osent prennent le pouvoir”, lit-on souvent sur LinkedIn… d’autres se contentent de “liker” ou préfèrent rester lecteurs de l’ombre (si mon employeur m’observait, est ce que j’assumerais ?...).

A la façon de lire ou plutôt de “parcourir" ce qui se joue sur ce réseau, nos réactions reflètent  le curseur du baromètre de notre for intérieur. Quant au réseau que l’on s’est créé, chacun y projette sa propre exigence et/ ou dépendance.  Nos biais de stéréotype jouent à plein : ils nous incitent à projeter sur les autres nos propres idées, convictions ou croyances, ou encore nous portent à croire que nous pouvons préjuger de la personnalité de quelqu’un, simplement à partir de quelques éléments…

Par ailleurs, du post futile au plus militant, de l’article le plus superficiel au plus éclairant, d’une étude de comptoir à celles de cabinets de renommée internationale, que dire de notre confiance envers ce qui nous revient ? A titre d’exemple, combien de fois vérifie t-on l’échantillonnage d’un test quantitatif dont on s’empare ? 

Peu importe d’où vient l’ivresse puisqu’on s’en accommode : l’ère est à l’instantanéité, au scrolling, à la réactivité, à la quantité plutôt qu’à la vérité. On peut s’en indigner, et pourtant notre dépendance est réelle, prenons donc toutefois le temps de le questionner, ne serait-ce que pour prendre du recul sur ce jeu de dupes où tout repose sur la confiance accordée. L’homme est décidément un loup pour l’homme alors autant s’amuser à porter le chaperon… !