MySofie, le pari du 100% télétravail

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MySofie, le pari du 100% télétravail

5 mai 2020

Le 100 % télétravail, c’est le choix adopté par Philippe Baranski et Aymeric Méhu, cofondateurs de la startup MySofie créée en 2017 et qui emploie 14 collaborateurs dispatchés sur l’ensemble de l’Hexagone. Un pari réussi.

Imposé par la pandémie, le télétravail définit de nouveaux modes de collaboration souvent empreints d’incertitudes. Parallèlement, ce mode de fonctionnement présente pourtant de nombreux avantages aux employés et employeurs dans son format volontaire. Lorsque le télétravail devient plus qu’un mode organisationnel, où l’agilité, la flexibilité et la confiance sonnent comme des réponses convaincantes.La startup MySofie qui développe un assistant personnel mobile embarquant tous les services santé et a levé 600 000 euros en 2019, a ainsi réussi le pari de la créativité et de l’innovation managériale. « Mon associé et moi, anciennement managers d’équipes, avions envie de travailler différemment. Nous avons alors fait le postulat que ce n’était pas le salarié qui devait s’adapter à l’entreprise, mais l’inverse. Pour cette aventure entrepreneuriale, nous voulions que nos collaborateurs se sentent à l’aise, qu’ils réalisent leurs tâches sans contraintes de déplacement ou de gestion d’emploi du temps. Nous n’avons pas de bureau et l’entreprise poursuit sa croissance sur la base du télétravail. Il n’existe pas d’exemple aujourd’hui comme le nôtre en France et pourtant c’est un modèle qui serait valable pour toutes les activités de service », assure Philippe Baranski, cofondateur, Partenariat et Santé, de MySofie et ancien directeur des ressources humaines chez Pro BTP.  Nul besoin d’investir dans un espace de travail, des frais d’entretien et de transports. Ainsi, cette pratique diminue d’une part les coûts de l’entreprise et semble d’autre part favoriser la productivité.

Rigueur et performance professionnelle

Les 14 collaborateurs cadres, essentiellement des "remote workers" ont ainsi fait le choix de quitter le salariat traditionnel pour rejoindre cette startup aux fondements novateurs. Si le télétravail inspire un sentiment de liberté aux employés, cette pratique ne correspond, cependant, pas à toutes les personnalités. « Pour les accepter au sein de l’équipe, j’évalue leur définition de la rigueur professionnelle, et les questionne sur leur manière de gérer l’auto-régulation et l’auto-motivation, souligne le dirigeant. Savoir s’actionner le matin et se créer des repères sont les clés d’une bonne performance professionnelle. Les collaborateurs pourraient très vite tomber dans le travers du laisser-aller et cela nuirait à l’ensemble de l’entreprise. Pour eux, la question est de savoir s’ils sont suffisamment rigoureux envers eux-mêmes pour accepter le télétravail ».  Libre aux employés d’instaurer leur propre plan de travail tant qu’ils atteignent leurs objectifs quotidiens. Si les collaborateurs respectent les règles du jeu, ils gagnent ainsi en autonomie, en responsabilité et en efficacité, tout en alternant facilement vie professionnelle et personnelle.

Temps forts : renforcer le sentiment d’appartenance

Cependant, si cette pratique affiche bien des atouts, le télétravail implique néanmoins un éventuel sentiment d’isolement. « Ce mode de fonctionnement peut difficilement s’appliquer à des gens qui attendent beaucoup des autres », explique le cofondateur. Aussi, pour renforcer le sentiment d’appartenance, MySofie se plie au rituel d’une visio-conférence matinale afin de faire le point et de prendre le pouls des collaborateurs. « Cela permet d’éliminer les soucis de communication entre les différents acteurs, d’exprimer les objectifs quotidiens et de mesurer le bien-être des collaborateurs. À nous, en tant que managers, d’être vigilants sur les signaux faibles ». Autre avantage, le directeur remarque clairement plus d’investissement et moins de non-dits. « Comme on ne se voit pas physiquement, on exprime nos ressentis et nos besoins avec bienveillance. Il y a une vraie libération de la parole ».

En parallèle, afin de créer plus de lien entre chaque collaborateur, la startup met en place des temps forts d’immersion totale tous les trimestres. « Nous travaillons et vivons ensemble pendant une semaine pour mieux apprendre à se connaître et créer un lien physique.  Je n’ai pas besoin de recourir à un consultant externe pour fédérer l’équipe, puisqu’elle travaille correctement ensemble. Ce qu’il faut, c’est partager des choses plus personnelles, faire passer des émotions, etc. Ce temps de partage est essentiel », détaille Philippe Baranski.  

Lâcher-prise et confiance

Coté employeur, le télétravail favorise une hausse de la flexibilité, une baisse du taux d’absentéisme et une hausse de la compétitivité. Cependant, avant de se lancer, les deux fondateurs ont étudié les conséquences de cette pratique originaire des États-Unis, devenue monnaie courante outre-Atlantique, en soulevant les problématiques qui freinent régulièrement les chefs d’entreprises français.  « Il faut se poser les bonnes questions. Comment gérer le travail à distance, communiquer, échanger de manière fluide, et contrôler la tâche ? Comment prendre la température des collaborateurs sur leur bien-être ? Ou alors comment créer du lien entre tous les collaborateurs ? », rappelle le cofondateur. Cette méthode d’organisation met, également, une croix sur les modes de contrôles traditionnels. Le lâcher-prise est, en général, une vraie problématique pour les managers. « Certains n’ont pour vocation que de contrôler le travail des autres. Avec le télétravail, la véracité de leur job n’est plus la même. Je suis certain que ceux qui auront moins bien vécu le télétravail lors du confinement, sont les managers qui ne produisent rien », avance celui qui dirige à distance, avant de poursuivre « Lors de mon ancienne expérience, je me suis rendu compte que de faire des points réguliers avec les collaborateurs, sans me déplacer, était plus efficace. En leur donnant ma confiance, ils étaient plus autonomes. La confiance et le lâcher prise sont ainsi des enjeux cruciaux pour un manager ».

Lui, en tout cas, n’a aucun regret après deux ans et demi d’activité de MySofie. « Je ne changerais pour rien au monde, même si au départ, nos investisseurs doutaient de notre modèle. L’art du leadership, c’est de prendre conscience que le dirigeant n’a pas de pouvoir mais que des responsabilités, dont celle de faire avancer l’entreprise », conclut-il.